Au moment qu'ils allaient sortir pour le combat,
Leurs chefs criaient : « Si l'un de vous, là-bas,
S'est fait une maison sans l'avoir habitée,
Qu'il retourne à son toit ! Si l'un de vous, là-bas,
S'est fait une vendange, et ne l'a pas goûtée,
Qu'il retourne à son vin ! Si l'un de vous, là-bas,
S'est fait une accordaille, et ne l'a point fêtée,
Qu'il retourne à sa femme ! Et si, pour le combat,
L'un de vous, par sa chair sent la peur écoutée,
Qu'il laisse la bataille, et retourne là-bas ! »
Et les restés chantaient, en marchant au combat :
« C'est à nous d'exalter le formateur des causes,
Le maître des commencements,
Dont la juste main acheva les choses
Qu'elle renouvelle éternellement.
« Il ne nous a point fait le sort des multitudes,
Sur le chemin des générations ;
Il nous a prodigué toutes les certitudes,
Pour en combler les nations.
« Nous espérons qu'un jour, il broiera les idoles
De l'insensé et du moqueur,
Afin que le méchant, recueillant sa parole,
La mette sur son cœur.
« Ils l'apprendront, les peuples de la terre,
Qu'il faut que tout genou se courbe devant lui ;
Ils la verront, sa splendeur solitaire,
Monter comme un soleil ail milieu de leur nuit !
Alors viendra son règne attendu d'âge en âge,
De lieu en lieu :
Chacun le louera d'un même langage,
Et Dieu n'aura qu'un Nom, et les hommes, qu'un Dieu ! »
C'est ainsi qu'ils chantaient, sous le liège rustique
Dont ils se façonnaient leurs boucliers d'enfants
Et, dans la tuerie, le chant du cantique
Renversait les chars et les éléphants
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