Maurice BERNSOHN,
le parcours d'un militant
1921-1979
par Eliezer SHAVIT

Maurice BERNSOHNPar moments, il y a des noms qui reviennent dans nos mémoires Ceux des hommes ou des femmes qu'il valait la peine de rencontrer. Des gens qui ont compté et parfois modifié nos itinéraires. Pas forcément des héros; mais des gens courageux. N'attendant pas que les évènements  arrivent pour entrer en action . Chacun  de nous, du reste, porte en lui sa liste de noms, listes donc, au pluriel, qui se complètent ou se recoupent. Des hommes ou des femmes présents aux bons moments. A l'avant garde souvent. Ces lignes sont consacrées à l'un d'eux; à Maurice Bernsohn décédé en 1979 à Tel Aviv.

Né à Strasbourg ; dans une famille de commerçants ; il monta à Paris dès l'age de dix huit ans . Sioniste déjà, peut être grâce à l'influence de son oncle Tobbie Salomon. Membre du mouvement Maccabi, il passa aux Eclaireurs Israélites de France avant d'immigrer en Israël ; il dirigea le Secrétariat de ce mouvement.

Maurice Bernsohn, durant toute sa vie , fut un militant sioniste fervent et convaincant. Militant politique aussi quand , conseiller municipal de la ville de Holon, il adhéra en 1967 au mouvement Rafi sous la tutelle de Ben Gourion et Moshe Dayan .

Robert Gamzon ( Castor) le décrit ainsi : "Maurice offre un curieux contraste : très lent dans ses gestes, il est très rapide dans sa pensée . Il est cultivé et fin et se préparait à entrer avant la guerre, à l'Institut agronomique" , et d"ajouter : "Pierrot (P . Kaufman) et Maurice sont sionistes tous les deux et considèrent leur séjour au chantier des Défricheurs comme une hakhshara (préparation)" ( Les eaux claires journal 1940-44).

Jack Meyer Moog (Loup) se rapelle avec émotion le rôle de commissaire national E.I. "ambulant" que Maurice remplit dans ces camps E.I. des années de guerre avec les troupes de Toulouse, Brives et Périgueux. Son enthousiasme communicatif et sa foi sioniste à toute épreuve. Son bagout extraordinaire. Aujourd"hui il est difficile d'imaginer que les EI avaient organisé des camps pendant ces années, allant jusquà porter leur uniforme traditionnel de 1940 à 1942 au moins.Loup et Charmy l'un et l'autre E.I., se souviennent encore de l'influence exercée par ce couple que formaient Annette et Maurice Bernsohn sur lesjeunes, à cette époque difficile.

Maurice Bernsohn resta fidèle à Castor et le suivit dans toutes ses entreprises, du maquis à la première armée française de De Lattre, Courageux, il fut de toutes les missions. Hubert Beuve-Mery écrit à ce propos : "Durement forgées dans le maquis du Tarn , une estime et une amitié sans faille m'ont uni jusqu'à leur mort à Maurice Bernsohn et à Robert Gamzon , guide rayonnant de la petite troupe de jeunes juifs qui nous avaient rejoints au combat (avant propos du directeur fondateur du Monde au recueil d'articles de Maurice Bernsohn publiés dans le grand quotidien) .

Le talent propre à Maurice Bernsohn et l'amitié de H.B.M. lui ouvrirent l'accès a priori difficile au journal Le Monde. Maurice y publia de nombreux articles fort remarqués, pour le plus grand bien d'Israël et des Juifs.

"J'arrivai juste à temps en Palestine en 1947 écrivit-il , pour y vivre la décision du partage et la guerre d'Indépendance" Il arrivait aussi juste à temps pour se joindre au groupe de Français formé à Degania par Castor en partance pour Neve Ilan, kiboutz créé en octobre 1946 en même temps que dix autres kiboutzim dans une nuit d'octobre de 1946. Nevé Ilan ne fut pas une grande réussite, puisqu'il cessa d'exister en 1956 dix ans après sa création, après avoir résisté à plusieurs crises graves. Mais plus que les dissensions à l'intérieur du groupe, la situation géographique quasi- impossible, le manque de terres cultivables à proximité furent déterminant dans l'échec du kiboutz, qui refusa les propositions de l'Agence Juive de s'implanter ailleurs.

Maurice Bernsohn en fut un des secrétaires , toujours sur la brèche à la recherche d'investisseurs. Entreprenant et toujours optimiste, il fut là comme ailleurs, en avance d'une idée :  l'hôtel et la station d'essence qu'il revêt de construire le furent après la guerre des 6 jours, qui recula les frontières et desserra l'étau autour de Nevé Ilan. Mais c'était trop tard pour les pionniers du kiboutz. La famille s'installa en ville et Maurice prit une part active à la vie économique du Pays. Directeur de sociétés, secrétaire général de la Chambre de Commerce franco-israélienne. Dans la dernière étape de sa vie, il devint conseiller à l'ambassade de France à Tel Aviv. 

Son expérience, ses relations furent utiles aux deux parties, Israël et la France.  En dehors de ses occupations professionnelles, Maurice Bernsohn donna beaucoup de son temps et de son énergie à l'Union des Juifs de France et des Pays francophones. Il en fut le véritable animateur, surtout entre les années1965 1972 ; Il fit de l'Union un organisme efficace. en recherchant le concours aussi bien du F.S.J.U. que de l'Agence Juive.  Dotée de moyens sérieux; l'Union parvint à aider les nouveaux Immigrants même financièrement, par l'octroi de prêts. Tous ceux qui l'ont connu dans son engagement communautaire peuvent témoigner de l'ardeur qu'il mettait pour aider les immigrants à trouver du travail et à convaincre souvent et à convaincre souvent ceux qui étaient déçus et voulaient repartir, à ne pas renoncer si vite.

Maurice Bernsohn, trop tôt disparu, restera pour beaucoup le militant au sens noble du mot. Mobilisable à merci, communiquant son enthousiasme à son entourage. Son optimisme nous manque.

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